Cette entreprise, vous n’en vouliez pas. Vous vous êtes lancé dans sa création à la suite d’un pari avec votre beau-frère, d’une dispute avec votre conjoint qui vous accuse de manquer d’ambition, ou tout simplement parce que, à une époque, ça semblait une bonne idée. Sauf que maintenant, vous avez la trouille. Ou la flemme. Bref, vous ne rêvez plus que d’une chose : vous débarrasser en catimini de ce boulet qui va vous priver pour longtemps de vos weekends et de vos vacances. Ne vous en faites pas : nous sommes là, et tout va bien se passer. En 7 leçons à suivre, scrupuleusement.
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Surtout, surtout, ne vous avisez pas d’exploiter l’un de vos talents. Vous avez passé dix ans dans la papeterie de luxe ? Reprenez une usine de sardines en boîte. Vous êtes un as en matériel et chaussures de sport ? Lancez-vous dans la vente de produits de beauté. Bref, prenez le contre-pied exact de vos compétences, si possible en exploitant un domaine qui ne vous passionne absolument pas, et justifiez votre choix à vos proches en expliquant que c’est tendance. Bien évidemment, il conviendra de ne suivre absolument aucune formation, dans quelque domaine que ce soit, de peur que toute cette belle ignorance retombe comme un soufflé. N’écoutez rien ni personne, foncez.
Rendez-vous dans votre CFE une semaine avant la date voulue de début d’activité, ne vous déclarez pas ou mal, auprès de votre Centre de Gestion Agréé, snobez les impôts, envoyez bouler l’Urssaf… et bien sûr, en corollaire de tout cela, ne réclamez pas l’ACCRE quand vous pourriez y prétendre après trois ans de chômage (d’où la certaine aigreur de votre conjoint). Tout faire au dernier moment et par-dessus la jambe, c’est vous assurer de n’avoir droit à aucun avantage.
Vous démarrerez votre entreprise avec un seul client (votre soeur) et un prescripteur (votre mère), et ne chercherez pas à vouloir plus, déclarant à qui veut l’entendre que la qualité de vos produits « parlera d’elle-même ». Pas de site Internet, aucune campagne de pub, aucun réseau à activer, ni plaquettes ni cartes de visite, rien, zib. Délivrez un marketing incohérent, frappez systématiquement à côté de votre cible (en parlant à votre clientèle d’ados comme s’ils étaient des profs de fac sexagénaires, par exemple). Vous avez bien raison : laissez-vous doucement ensevelir dans les sables mouvants de la concurrence. Bientôt, seuls les impôts se souviendront de votre existence, pour vous donner le coup de grâce.
Construisez votre prévisionnel comme si vous étiez le directeur commercial de L’Oréal, en tablant sur un chiffre d’affaire délirant et un nombre de clients multiplié par 20 en… disons 3 mois. Ne laissez pas le temps au temps, exigez tout, tout de suite, avec un minimum d’efforts. Puis, démarrez une dépression face à vos chiffres catastrophiques.
A ce sujet, nous faisons confiance à votre imagination : un bureau en cristal, un stage de formation aux Maldives, des bureaux quatre fois trop grands, équipés comme dans une start-up informatique… Bref, ne mettez rien de côté pour les périodes de vaches maigres, la trésorerie de votre entreprise servira à payer vos prochaines vacances. L’autre solution, ultra-efficace, c’est évidemment d’embaucher plus de monde que vous n’en avez besoin, et tout de suite. Gouffre financier garanti, sans parler de vos frais de tribunaux aux Prud’hommes quand vous serez assigné par vos trois secrétaires personnelles non-rémunérées depuis… depuis toujours, en fait.
En revanche, retrouvez votre âme de gestionnaire accompli quand il s’agira de refuser les investissements qui pourraient vraiment faire décoller votre boîte, par exemple, au hasard, vous offrir les services d’un expert-comptable ou d’un avocat. Ou d’un ordinateur en état de marche. Ou d’un hébergeur (après tout, vous avez refusé de créer un site, non ?).
Un échec pointe le bout de son nez, un client fait ses valises, un fournisseur vous tourne le dos ? Hourrah ! Le moment que vous attendiez tant est arrivé. Enfermez-vous immédiatement dans un mutisme de bon aloi. Coupez toute communication avec vos collaborateurs, vos associés, vos proches, et prenez d’ores et déjà rendez-vous avec un bon psychiatre, le genre qui prescrit vite, bien et fort. Puis, enfermez-vous dans votre chambre et émettez de temps à autres soupirs, sanglots et râles inquiétants. Votre conjoint, celui-là même qui vous avait poussé dans ce traquenard, n’hésitera plus aujourd’hui à vous supplier de mettre la clé sous la porte.
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