« Je peux te tutoyer ? » demande le militant socialiste ; « Si vous voulez » répond le premier secrétaire François Mitterrand… Derrière cette anecdote se cache un véritable problème de management : que choisir entre le tutoiement et le vouvoiement en entreprise ? Eléments de réflexion.
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Il y a eu une phase entre les années 70 et 90 où le tutoiement avait largement gagné certains secteurs d’activité, pour ne pas dire tous (ou presque : le BTP par exemple offre une situation très particulière où il est fréquent le patron tutoie ses employés alors que les employés vouvoient leur patron). A une époque, on a même pu parler de management à l’américaine dans cette logique du tutoiement généralisé. En oubliant que l’anglais ne connaît pas notre subtilité linguistique franco-française…
L’idée : effacer les différences hiérarchiques, créer plus de proximité, d’engagement, d’échange, etc.
D’une manière générale, les chercheurs notaient dès 2008 un recul du tutoiement au profit du vouvoiement. « La routourne a tourné », comme dirait notre linguiste national Franck Ribéry. Pour autant, le tutoiement est resté dans certains milieux et certaines entreprises. La mode, la communication, les médias par exemple sont souvent cités en exemple comme des milieux dans lesquels le tutoiement est presque une obligation. Mais tout le monde ne travaille pas dans une agence de communication.
Le problème ? Le tutoiement est ambigu chez nous. Tout simplement parce que, comme notre langue connaît les deux modalités de communication, elles sont associées à des contextes différents : le tutoiement relève de la sphère privée, le vouvoiement de la sphère publique. Au-delà de ce clivage, le tutoiement implique une proximité franche, le vouvoiement un respect distancié.
Certains, patrons comme salariés, en arriveraient à ne plus réussir à faire la part des choses. Car ce n’est pas parce qu’on se tutoie qu’on est copains et qu’on peut se permettre certaines libertés. La limite devient parfois plus floue.
Faut-il de ce fait bannir le tutoiement ? Certainement pas. En réalité, comme souvent, tout est affaire de personnalités et de culture d’entreprise. Ce qui est important, c’est que rien ne soit forcé. Imposer le tutoiement généralisé comme le vouvoiement généralisé est une absurdité : il faut laisser à chacun le temps de se faire sa place dans l’entreprise et de faire ses choix. Un tutoiement obligatoire induit une certaine hypocrisie dans les relations là où un vouvoiement obligatoire pour tous induit une certaine réserve, voire un contrôle excessif de sa parole.
Ce qu’il faut toujours garder en tête, quelles que soient les modalités d’échange dans une entreprise, c’est que c’est la qualité, la performance et la sincérité de la communication entre les collaborateurs qui doivent primer. Car ce sont elles qui garantissent la performance de l’entreprise. Alors vouvoiement ou tutoiement, à vous de voir, tant que c’est bien fait.
Pour certains commerciaux, le tutoiement est devenu une sorte d’arme secrète pour créer une proximité avec les clients et faciliter les ventes. C’est faux. Ceux qui croient cela devraient changer de métier : existe-t-il quelque chose de plus insupportable ou de plus gênant qu’un commercial qui vous tutoie et vous parle comme à un ami ?
A moins qu’un client que vous connaissez depuis déjà pas mal de temps vous propose de passer au tutoiement ou, spontanément, dans une conversation, se mette à vous tutoyer, notre conseil reste de vouvoyer vos clients.
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