En temps de crise, travailler dans l’entreprise familiale, c’est un peu le moyen de se tenir au chaud et de se rassurer en attendant la fin d’un long l’hiver : on se dit qu’au pire, il y aura toujours un père, une mère, une sœur ou un frère pour nous remonter le moral. On en oublierait presque les spécificités du management d’entreprise familiale. Des spécificités qui, parfois, prennent l’allure d’un authentique casse-tête.
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En France, 83% des entreprises sont des entreprises familiales, et parmi elles, environ 75% sont des TPE. Et notre pays n’est pas exactement une exception puisque le modèle d’entreprise familiale est connu de tous et partout, en gros depuis que l’un de nos ancêtres a eu l’idée de montrer à Junior comment tailler un silex pour subvenir aux besoins de la famille. Il y a encore un siècle, chaque entreprise familiale suivait une trajectoire assez rectiligne : le fils aîné reprenait le flambeau, ou bien la fille se mariait avec un jeune homme susceptible de développer la société. La vie était simple, et la psychanalyse, une simple lubie d’Autrichiens.
Aujourd’hui, bien sûr, les choses ont changé. Les fils et les filles d’un patriarche d’entreprise n’ont pas toujours le désir de prolonger la saga, ou bien ils sont plusieurs à se mettre de la partie, et si la discorde s’installe, on place alors l’entreprise familiale dans d’autres ornières. Mais avant même de brandir le spectre du démantèlement, il faut d’abord considérer le simple management de l’entreprise fondée par papa ou maman. Vous qui avez fait vos premiers pas entre deux tourneuses-fraiseuses (à l’époque, les services sociaux étaient beaucoup moins regardants), qui avez joué sur les genoux du contremaître et qui, plus tard, avez effectué vos premiers jobs avec les manutentionnaires, vous êtes ici comme chez vous. Vous n’avez peut-être pas suivi la moindre formation, hormis la belle école de la vie, tout comme votre père, votre grand-père, et trois ou quatre générations de passionnés d’argenterie auvergnate, un art aussi délicat que méconnu. Alors, quand la complexité du monde économique s’invite à la table familiale, forcément, ça fait comme un froid. Pas de panique, cependant : manager une entreprise familiale n’est pas beaucoup plus difficile que de coller un aïeul récalcitrant en maison de retraite. Dans un cas comme dans l’autre, il suffit de se fixer une ligne de conduite, et un protocole.
Entre votre père, qui garde toujours un pied dans la société de peur de pourrir d’ennui dans sa maison de campagne (celle qu’il a mis vingt ans à retaper et qu’il avait juré ne plus quitter, oui), vos frères qui se sont mis en tête que le management à la néo-zélandaise allait faire « grave décoller la boîte », et votre cousine en stage dans les bureaux pour valider ses études de marketing, sans compter les autres, les employés lambda, ceux avec qui, le ciel soit loué, vous n’avez jamais partagé de piscine gonflable, il y a de quoi perdre le nord. Mieux vaut instaurer des règles très claires dès le début, entre ce qui se passe au bureau et les joyeuses réunions familiales (et privées).
Laissez les vieux dossiers au placard quand vous travaillez avec votre sœur Josiane, celle qui, selon vous, a précipité la fin de votre mariage, et contentez-vous d’aborder le cœur du problème : vos délais de livraison. En tant que manager, vous donnez le ton : si vous vous laissez embarquer dans les questions sentimentales ou privées (si vous travailler avec votre conjoint ou votre fils, les tentations seront nombreuses), tout le monde fera de même autour de vous. En moins de deux, ce sera la zizanie.
Oh, rien de bien terrible, on ne vous demande pas de rédiger une thèse, mais quelques bases élémentaires viendront agréablement compléter votre background de fils de famille. On sait bien qu’il y a de grandes chances pour que vous ayez forgé vos armes dans tous les services de l’entreprise, à commencer par le fameux stage photocopieuse et entretien des équipements (vous passiez la serpillère trois fois par semaine), et que dans le domaine de l’entreprise familiale, l’apprentissage sur le tas est la règle. Mais de plus en plus d’ « héritiers » passent également par la case école de commerce avant de prendre les commandes. Parce que connaître par cœur toutes les dates-clés de votre belle PME centenaire ne fait pas forcément de vous un dirigeant éclairé. Profitez-en aussi pour voir comment se passent les choses par-delà les frontières de votre royaume. Quelques stages chez la concurrence (ou dans un tout autre secteur) ne feront qu’élargir vos horizons.
Vous avez la fierté de l’ascendance, l’obsession de l’arbre généalogique, vous avez la larme à l’œil dès que Gérard, votre grand-père, évoque la 1ere commande en gros d’une chaîne commerciale, honorée en un battement de cil, bref, vous avez la fibre patrimoniale. Grand bien vous fasse : c’est cette passion qui doit vous guider et vous aider à faire les bons choix. Et c’est elle, également, qui fera de vous le meilleur ambassadeur de l’entreprise familiale auprès de ses clients et prospects. N’hésitez pas à surjouer un peu : vendez l’histoire familiale comme s’il s’agissait d’une saga à la Citroën, sortez le béret de l’arrière-grand-père en faisant visiter à vos nouveaux clients asiatiques, appelez tous vos employés par leur prénom (quitte à en inventer) : faites dans la couleur locale et l’authenticité. Super pub en perspective.
Non, ce n’est pas d’une étrange recommandation nutritionnelle, mais bien un projet à examiner : faire entrer dans votre équipe un cadre venu de l’extérieur ne présente pas tant de difficultés, à condition de bien le choisir. Il pourra ainsi vous apporter une vision nouvelle, tout en vous faisant bénéficier de sa neutralité : personne ne lui fera la gueule au prochain repas dominical, à lui. Vous pourrez même pousser le vice jusqu’à l’envoyer en première ligne quand il s’agira d’annoncer les mauvaises nouvelles. Pas très courageux, mais votre tranquillité de cadre dirigeant a un prix.
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